Rejet de chèque, information préalable et responsabilité

Il convient de s’intéresser à un arrêt qui a été rendu par la Cour de Cassation en juin 2017 qui vient aborder la question spécifique du rejet de chèque, du rejet de plusieurs chèques établis par une société qui s’est retrouvée par la suite en redressement judiciaire puis en liquidation judiciaire.

 

Il vient aborder la question de l’information préalable que doit adresser la banque au titulaire du compte.

 

Et ce, qu’il s’agisse d’un particulier ou d’un professionnel,

 

La banque est en effet tenue, préalablement au rejet de chèque pour défaut de provision suffisante, de prévenir son client afin que celui-ci soit en mesure de ré créditer le compte et d’éviter toutes difficultés bancaires et financières.

 

Il convient de rappeler que l’article L131-73 du Code Monétaire et Financier prévoit que :

 

« Le banquier tiré peut, après avoir informé par tout moyen approprié mis à disposition par lui le titulaire du compte des conséquences du défaut de provision, refuser le paiement d’un chèque pour défaut de provision suffisante. Il doit enjoindre au titulaire du compte de restituer à tous les banquiers dont il est le client les formules en sa possession et en celle de ses mandataires et de ne plus émettre des chèques autres que ceux qui permettent exclusivement le retrait de fonds par le tireur auprès du tiré ou ceux qui sont certifiés. Le banquier tiré en informe dans le même temps les mandataires de son client ».

 

Cet arrêt est intéressant car il vient aborder deux points précis.

 

Tout d’abord, il aborde la question de la responsabilité de la banque qui a manqué à son obligation d’information préalable en cas de rejet de chèque et vient aborder en second lieu la question de l’indemnisation et du préjudice qui aurait été subi en l’état de la faute commise par la banque.

 

Mais surtout cet arrêt est d’autant plus intéressant qu’il aborde la question du préjudice pour la société commerciale.

 

Dans cette affaire, la société VE a conclu une convention d’ouverture de compte courant avec l’établissement bancaire avec une autorisation de découvert.

 

En mars et en mai 2006, la banque a rejeté plusieurs chèques pour défaut de provision,

 

Or, aprés avoir été mise en redressement judiciaire, la société VE a assigné la banque en responsabilité pour rupture abusive de crédit et pour défaut d’information préalable au rejet des chèques émis sans provision suffisante.

 

La société VE ayant été mise en liquidation judiciaire le 30 mai 2008, la SCP X, a été désignée en qualité de liquidateur, puis est intervenue à l’instance es qualité.

 

La société VE faisait grief à la banque d’avoir manqué à son obligation de bonne foi en rejetant, sans aucune information préalable pourtant prévue par l’article L. 131-73 du code monétaire et financier, plusieurs dizaines de chèques et en mettant ainsi fin au découvert autorisé.

 

La question était de savoir si la banque avait remplie ses obligations,

 

La banque en semblait persuadée,

 

Pour autant, il n’en est strictement rien.

 

C’est dans ces circonstances que la société VE a entendu engager la responsabilité de l’établissement bancaire,

 

Elle lui reproche surtout d’avoir adressé des avertissements n’identifiant aucun des chèques concernés.

 

A ce sujet, il est bien évident qu’il y a matière à distinguer un particulier d’une société ou d’un commerçant qui peut émettre un certain nombres de chèques pour lesquelles il a besoin d’un soutien de l’établissement bancaire qui en qualité de partenaire privilégié de son activité a vocation à lui apporter toutes les réponses utiles

 

Plus particulièrement en l’informant des chèques en question.

 

Il est bien évident que le nombre de chèques émis par un professionnel a vocation à représenter un volume bien plus important qu’un simple particulier,

 

Le 6 mars 2006, la banque avait informé la société VE que « la position du compte ne permettait pas d’effectuer le règlement d’un chèque »

 

Pour autant, cette lettre n’identifie pas le chèque en cause, et par la suite, aucun avertissement n’a été adressé par la banque pour les 32 chèques rejetés le 10 mars 2006 et le 29 mai 2006,

 

La banque avait alors indiqué à la société VE que « la position du compte ne permettait pas d’effectuer le règlement des chèques venant d’être présentés et elle a mis fin à la convention de compte.

 

Sur le terrain factuel, il ressort clairement que la banque s’était bien gardée d’apporter quelques précisions sur les chèques en question.

 

In fine, cette jurisprudence est satisfaisante,

 

Elle consacre clairement la responsabilité de la banque pour avoir manqué à son obligation d’information préalable du titulaire du compte fut il un client professionnel.

 

Pour autant, la réponse à la première question en appelle forcément une deuxième,

 

En effet, le vrai débat concerne l’indemnisation du préjudice subi.

 

Sur cette question spécifique, la Cour de Cassation est beaucoup plus sévère,

 

Elle sanctionne la Cour d’Appel qui a condamné la banque à payer au liquidateur une somme correspondant au solde débiteur du compte,

 

Alors qu’après avoir énoncé que les dispositions de l’article L. 131-73, alinéa 1er, du code monétaire et financier prévoient une information de la banque au titulaire du compte, préalable au rejet de chèque pour défaut de provision suffisante, elle a retenu que la banque a engagé sa responsabilité en adressant des avertissements n’identifiant aucun des chèques concernés à sa cliente qui est fondée à obtenir réparation du préjudice né du rejet indu des chèques en cause ;

 

Pour autant, sur la question spécifique de l’indemnisation du préjudice né du rejet de chèque indu, la Haute Cour ne partage pas l’avis de la Cour d’Appel.

 

En effet, la Cour d’appel avait indemnisé l’entreprise à hauteur du solde débiteur du compte,

 

Mais la Cour de Cassation considère qu’en statuant ainsi, alors que le préjudice résultant du défaut de délivrance de l’information prévue par l’article L. 131-73, alinéa 1er, du code monétaire et financier, qui ne se confond pas avec le rejet fautif du chèque, consiste en la perte de la chance, pour le titulaire du compte, d’approvisionner celui-ci pour couvrir les chèques émis et échapper aux conséquences qui résultent du refus de paiement du chèque,

 

De telle sorte que la cour d’appel aurait violé le texte susvisé.

 

Concernant le préjudice, la Cour de Cassation considère que le préjudice ne peut-être fixé à hauteur du découvert du seul débiteur du compte puisque la véritable problématique était relative au rejet des chèques mais surtout à la capacité qu’avait l’entreprise à couvrir le compte bancaire pour pouvoir faire face aux chèques rejetés en question.

 

Sur ce point, la Cour de Cassation est un peu sévère,

 

Elle considère qu’il y a matière à réflexion sur la réparation du préjudice subi car la Cour d’Appel aurait du rechercher si le paiement des chèques litigieux par la banque n’aurait pas porté lé débit du compte de sa cliente au-delà du découvert autorisé.

 

La véritable question est de savoir si celle-ci aurait été en mesure de faire face à ses obligations et donc de payer les créances en question.

 

Dès lors c’est à juste titre que la Cour de Cassation considère que la Cour d’Appel ne pouvait confondre le solde débiteur du compte et le préjudice subi par l’entreprise qui ne peut s’entendre que comme la perte de chance pour le titulaire du compte d’approvisionner celui-ci pour couvrir les chèques émis.

 

La question du préjudice est à mon sens un sujet important car retenir la faute de l’établissement bancaire est une chose et quantifier le préjudice à sa juste mesure en est une autre,

 

Pourtant le sujet de l’indemnisation et de la quantification du préjudice est extrêmement important.

 

Plus particulièrement en liquidation judiciaire afin de désintéresser les créanciers admis au sein de la procédure collective,

 

La décision est quand même à saluer dans son ensemble et ce pour deux raisons, même s’il y a de quoi « rester sur sa faim »,

 

Il est vrai qu’elle vient clairement caractériser la responsabilité de l’établissement bancaire

 

Il est tout aussi vrai qu’elle vient apporter certaines précisions sur la question de l’indemnisation.

Cependant, à mon sens, le raisonnement est incomplet,

 

Il est bien évident que l’établissement bancaire en l’état des impayés a clôturé le compte et donc généré une cotation près de la Banque de France qui a donné une « mauvaise image » de l’entreprise VE et dès lors celle-ci s’est immanquablement retrouvée handicapée,

 

Cette situation était génératrice de perte de confiance absolue de ses partenaires économiques.

 

Sur ce point, il est bien évident que le préjudice ne peut se cantonner à la seule perte de chance pour le titulaire du compte d’approvisionner celui-ci pour couvrir les chèques émis.

 

Car il ne faut pas oublier que passé l’étape des chèques rejetés, la banque a clôturé le compte bancaire de l’entreprise et l’a affligé d’une « cotation bancaire » désastreuse pour la confiance financière que la société VE souhaitait entretenir avec ses partenaires économiques,

 

Dès lors, le préjudice doit être regardé dans un champ indemnitaire bien plus large,

 

Cette jurisprudence, qui pouvait sembler réductrice sur la question indemnitaire peut sembler incomplète, et pourrait, par une analyse plus extensive, permettre de faire supporter l’intégralité du passif de la procédure collective par l’établissement bancaire qui a eu un comportement abusif et non conforme à la Loi et à la jurisprudence en vigueur.

Ruine du fonds et faute du liquidateur du locataire gérant,

Il convient de s’intéresser à un arrêt rendu par la Cour d’Appel de Versailles en mars 2017 qui vient aborder la question spécifique du sort des salariés lorsque le locataire gérant fait l’objet d’une liquidation judiciaire, et que le mandataire liquidateur croit bon transférer lesdits salariés au propriétaire du bail commercial au titre de la solidarité légale, suivant qu’il y ait ou non ruine du fonds,

 

En effet, dès lors que le locataire gérant est en liquidation judiciaire, le mandataire judiciaire a l’obligation de licencier les salariés ce qu’il fait en général dès le prononcé de la liquidation judiciaire, comme la Loi lui impose de le faire,

 

Dans cette affaire, le 2 décembre 2003, le Tribunal de Commerce de Nanterre a arrêté un plan de continuation au profit de deux sociétés pour une durée de 10 ans suite à l’ouverture de procédures collectives intervenues respectivement les 25 mars et 1er avril 2003.

 

Dans ce cadre, la société D avait repris les deux sociétés en redressement judiciaire, en mars 2006.

 

Pour autant en juin 2007, la société D avait procédé à la location gérance de son fonds de commerce d’étalonnage numérique et d’effets spéciaux au profit d’une autre société, la société B,

 

Les contrats de travail des salariés attachés à ces activités, en ce compris le contrat de travail de Monsieur C ont donc été transférés au sein de la société B, en application de l’article L.1224-1 du Code du Travail.

 

Les contrats étaient repris aux mêmes conditions de travail, de rémunération et d’ancienneté mais étaient désormais régis par la convention collective des entreprises techniques au service de la création et événements.

 

Or, par jugement du 1er décembre 2011, le Tribunal de Commerce de Nanterre a prononcé la liquidation judiciaire de la société B, mettant ainsi fin au plan de continuation établi le 2 décembre 2003 et a fixé la date de cessation des paiements au 29 novembre 2011.

 

Ce même jugement de liquidation judiciaire prévoyait cependant le maintien de l’activité pour une durée d’un mois afin d’envisager une cession de l’entreprise.

 

A défaut de solution de reprise, la fermeture définitive de l’établissement est intervenue le 20 décembre 2011.

 

Par courrier du 22 décembre 2011, la société D, propriétaire du fonds, a informé le mandataire liquidateur, qu’elle résiliait, à compter du 31 décembre 2011, la location gérance qu’elle avait consentie à la société.

 

Or, par courrier du 2 janvier 2012, le mandataire liquidateur de la société B, a informé Monsieur C du transfert de son contrat de travail à la société D à compter du 30 décembre 2011.

 

Pour autant, c’était également sans compter les difficultés économiques de la société D qui se retrouvant sans rentes et sans revenus locatifs issus du contrat de location gérance, et qui entend soutenir la ruine du fonds,

 

Ainsi, et par jugement du 12 janvier 2012, le Tribunal de Commerce de Nanterre a prononcé la liquidation judiciaire de la société D sur résolution du plan de redressement établi le 2 décembre 2003 et fixé la date de cessation des paiements au 5 décembre 2011.

 

Il a autorisé la poursuite, pour une durée d’un mois, soit jusqu’au 31 janvier 2012, de l’activité de la société afin d’envisager une cession de l’entreprise.

 

In fine, la cession de l’entreprise a eu lieu et par jugement du 3 février 2012, le Tribunal de Commerce à:

 

  •  ordonné la cession des actifs

 

  • ordonné, conformément aux dispositions de l’article 1224-1 du Code du Travail, le transfert de 12 contrats de travail des salariés rattachés au service de l’étalonnage numérique

 

  • autorisé le licenciement de 11 autres salariés, dont le poste occupé par Monsieur C

 

C est dans ces circonstances que le liquidateur judiciaire, a notifié le 28 février 2012 aux salariés dont Monsieur C leur licenciement pour motif économique.

 

Une grande partie des indemnités ont alors été pris en charge par les AGS.

 

Pour autant, contestant son licenciement et estimant ne pas avoir été rempli de ses droits, monsieur C a saisi le Conseil de Prud’hommes, pour voir déclarer illicite le transfert de son contrat de travail de la société B vers la société D, et ce, nonobstant le fait qu’in fine les deux entreprises ont toutes les deux fait l’objet d’une liquidation judiciaire,

 

Dès lors la question posée à la Cour d’Appel était de savoir si oui ou non, le transfert du contrat de travail était valable, ou si inverse il y avait ruine du fonds,

 

Cette validité du transfert du contrat de travail était notamment contesté par la société D, propriétaire du fonds, qui considérait que le mandataire judiciaire avait non seulement manqué à ses obligations mais avait également et surtout provoqué la ruine du fonds.

 

Il convient de rappeler que tout changement d’employeur suppose pour le salarié la rupture du contrat de travail qui le liait au premier employeur et la conclusion d’un contrat distinct avec la nouvelle entreprise.

 

Néanmoins, au terme de l’article L1224-1 du Code du Travail:

 

« Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l’employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l’entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise. »

 

Pour qu’il y ait transfert des contrats de travail, l’entreprise doit donc passer d’une personne juridique à une autre, peu important la forme de l’opération, l’entreprise devant simplement se poursuivre sous une direction nouvelle et constituer une entité économique autonome.

 

L’entité économique transférée doit conserver son identité et poursuivre son activité, celle-ci se définissant comme un ensemble organisé de personnes et d’éléments corporels ou incorporels permettant l’exercice d’une activité économique qui poursuit un objectif propre.

 

Ces règles s’appliquent également lorsqu’un fonds de commerce fait l’objet d’une location-gérance et lorsque, en fin de location-gérance, le fonds retourne à son propriétaire, quelle que soit le motif de la modification de la situation juridique de l’employeur dès lors que la situation visée correspondait à un transfert d’une entité économique autonome conservant son identité et dont l’activité est poursuivie ou reprise.

 

La règle du transfert des contrats de travail ne porte pas atteinte au droit de licenciement dont dispose le nouvel employeur après la modification, sauf collusion frauduleuse entre les deux employeurs.

 

Ainsi, le propriétaire-bailleur du fonds est tenu de reprendre les contrats de travail alors même qu’il a été lui même mis en redressement judiciaire postérieurement à la mise en location-gérance.

 

Ce qui est d’ailleurs le cas d’espèce puisque dans cette affaire, la société D avait également été placée en liquidation judiciaire,

Sauf en cas de ruine du fonds,

 

Néanmoins, le retour du fonds dans le patrimoine de l’entreprise cédante n’est valable que s’il y a transfert d’une entité économique autonome conservant son identité et si le fonds de commerce était encore exploitable, peu important que cette dernière ait ensuite cessé son activité.

 

Le seul motif de l’existence d’une procédure collective et même le prononcé de la liquidation judiciaire à l’encontre du locataire-gérant ne suffit pas à faire présumer que le bailleur ne peut pas en poursuivre l’exploitation, et il appartient aux salariés qui invoquent l’illégalité du transfert de leur contrat de travail de démontrer qu’il y a eu, à cette date, ruine du fonds,

 

Lorsque l’activité est inexploitable, ou lorsqu’il y a ruine du fonds, lors de la résiliation du contrat de location-gérance, les dispositions de l’article L.1224-1 du Code du Travail ne trouvent pas à s’appliquer et le transfert chez le propriétaire du fonds des contrats de travail des salariés attachés à l’activité en cause ne peut se faire sans leur accord express préalable.

 

Monsieur C estimait que le transfert de son contrat de travail de la société B vers la société D à la suite de la résiliation de la location gérance était illicite au motif qu’il y avait eu ruine du fonds, qu’il n’y avait pas eu de transfert d’une entité économique autonome conservant son identité et dont l’activité aurait été poursuivie chez le repreneur.

 

Il indiquait qu’il n’y a pas eu de reprise, par la société D, de moyens corporels ou incorporels significatifs et nécessaires à l’exploitation.

 

Ce que soutenait d’ailleurs aussi la société D,

 

Dès lors, faute de justifier d’un transfert légal du contrat de travail ou de son accord pour accepter un changement d’employeur, l’application des dispositions de l’article L1224-1 du Code du Travail est illicite.

 

De ce fait, son contrat de travail ne pouvant pas être rompu par la société D mais par la société B, son licenciement est sans cause réelle et sérieuse et son indemnisation doit être mise à la charge de la société B.

 

Le mandataire judiciaire de la société B quant à lui ne partage pas cet avis et considère que le transfert du contrat de travail avait eu lieu conformément aux dispositions légales.

 

Pour autant l’arrêt mérite une attention particulière quant aux raisons qui auraient empêché le transfert du contrat de travail,

 

Le salarié considérait que le transfert des contrats de travail à la suite de la résiliation d’une location gérance nécessitait le transfert des matériels indispensables à la poursuite de l’activité chez le nouvel employeur,

 

Or, selon lui, tel n’était pas le cas,

 

Les pièces versées aux débats par Monsieur C permettent de constater que, dans le cadre de la procédure de liquidation de la société B, certains matériels attachés à l’activité avaient été mis en vente à la demande du mandataire liquidateur dans le cadre de sa mission de réalisation des actifs, à l’instar de plusieurs machines,

 

Or, la particularité de cette argumentation était de considérer que non seulement il y avait ruine du fonds mais que surtout que celle-ci avait été générée par les diligences propres du mandataire liquidateur dans le cadre des opérations de réalisation des actifs propres à toute liquidation judiciaire.

 

Cette argumentation est retenue par la juridiction du deuxième degré,

 

En effet, la Cour d’Appel de Versailles relève à juste titre que le mandataire liquidateur a participé à la ruine du fonds et c’est en cela que la jurisprudence est intéressante.

 

En effet, non seulement il est clairement acquis que la ruine du fonds est caractérisée mais surtout qu’in fine, c’est le mandataire liquidateur qui en est à l’origine et qui expose par là même sa responsabilité.

 

La Cour retient que si, comme le souligne le mandataire liquidateur, le jugement du tribunal de commerce du 12 janvier 2012 ayant prononcé la liquidation judiciaire de la société D a autorisé la poursuite d’activité jusqu’au 31 janvier 2012, cela ne signifie pas qu’elle ait été réellement poursuivie, les éléments précédemment rappelés démontrant le contraire.

 

D’ailleurs, le jugement rendu le 3 février 2012 par le Tribunal de Commerce de Nanterre, autorisant la cession des actifs de la société D à une société tierce, ne fait pas mention du rachat des matériels spécifiquement liés à l’activité en question, la reprise d’éléments corporels et incorporels pour 90.000,00 euros apparaissant liée à l’activité étalonnage pour laquelle 8 salariés étaient repris.

 

Alors que la proposition de reprise de la société tierce pour l’activité étalonnage mentionne l’existence d’une annexe comportant une liste des actifs repris, établie par un commissaire priseur.

 

Or non seulement le mandataire liquidateur ne verse pas au débat ce document.

 

Mais surtout il ne saurait nier que les moyens corporels et/ou incorporels nécessaires à la poursuite de l’exploitation de l’activité en question, n’ont pas été transférés à la société D.

 

Et pour cause, c’est lui qui, en qualité de mandataire liquidateur de la société B a procédé à la réalisation des actifs mobiliers en saisissant le juge commissaire à cette fin et en faisant désigner un huissier de justice ou un commissaire priseur afin de procéder à la vente aux enchères publiques de l’ensemble des actifs,

 

C’est encore sans compter les diligences propres au mandataire liquidateur consistant à résilier l’ensemble des contrats de location, ce qui freine

 

Cette jurisprudence est intéressante car elle démontre bien que dans la mesure où le mandataire liquidateur procède au transfert des contrats de travail suite à la résiliation d’une location gérance, il importe surtout que le transfert du matériel indispensable à la poursuite de l’activité du nouvel employeur soit effectué.

 

Cette jurisprudence est très claire.

 

Dans la mesure où le mandataire liquidateur a procédé à la vente des actifs, non seulement, le transfert du fonds n’est pas caractérisé clairement mais surtout tout laisse à penser que le fonds est en ruine et ce de par le fait du mandataire liquidateur.

 

Toutefois, une problématique se pose, car s’il y a tout lieu d’imaginer que le transfert du fonds n’a pas été réalisé convenablement ce serait au mandataire liquidateur de prouver qu’il a fourni l’ensemble des actifs et éléments attachés au fonds de commerce,

 

Or, dans le cas d’espèce, il ne fournit aucun inventaire ni aucun justificatif,

 

Dès lors, tout laisserait à penser que la ruine du fonds est caractérisée,

 

Pour autant, c’est au propriétaire du fonds de commerce ruiné de rapporter la preuve de cette ruine.

 

Il est bien évident que cela constitue une véritable difficulté sur le terrain probatoire car si le mandataire judiciaire se refuse à communiquer les éléments de transfert, le bailleur ruiné sera d’autant plus en peine de démontrer que la ruine est caractérisée.

 

Pour autant, immanquablement cette jurisprudence est intéressante et salutaire car elle démontre bien que dans la mesure où le mandataire liquidateur procède au transfert des contrats de travail suite à la résiliation du contrat de location gérance, il importe surtout que le transfert de l’ensemble des éléments corporels et incorporels indispensables à la poursuite de l’activité du bailleur soit correctement effectué sans quoi la ruine du fonds est non seulement caractérisée mais semble incontestablement causée par le mandataire liquidateur.

 

A ce que ce dernier engage sa responsabilité personnelle et professionnelle, il n’y a à mon sens qu’un pas à franchir que le bailleur ou le salarié ne doit pas écarter et que la jurisprudence ne manquera pas de développer.