Laurent latapie avocat tribunal aix

La pension militaire d’invalidité, entres conditions de la reconnaissance et imputabilité des blessures ou de la maladie en lien au service. Qu’en est il des démarches à entreprendre ? Comment doit se dérouler l’expertise ? Que dois t’on lire dans le dossier médical créé lors de l’examen de sélection et d’incorporation

Article :

Il convient de s’intéresser aux démarches nécessaires et aux conditions d’octroi de la pension militaire d’invalidité réclamée par un militaire.

Toute la problématique découle notamment de l’imputabilité qui peut y avoir entre une problématique de santé et la pension militaire d’invalidité réclamée par le militaire.

Il convient de rappeler que le Code des Pensions Militaires d’Invalidité et des Victimes de la Guerre a été refondu par l’ordonnance 2015-1780 du 28 décembre 2015 et son décret d’application n°2016-1903 du 28 décembre 2016 avec une entrée en vigueur de ses dispositions au 1er janvier 2017.

L’article L 1 du Code des Pensions Militaires d’Invalidité et des Victimes de la Guerre stipule que « la République française, reconnaissante envers les combattants et victimes de guerre qui ont assuré le salut de la patrie, s’incline devant eux et devant leurs familles. »

L’objet de la loi est de réglementer les conditions dans lesquelles la reconnaissance de la Nation doit se manifester mais le caractère même de la dette fait qu’elle ne peut être marchandée.

Ainsi nait la problématique de l’imputabilité entre blessures et maladie et lien au service permettant d’ouvrir droit à la pension militaire d’invalidité.

Il importe de préciser que les articles L 121-2-2 et suivants du Code des Pensions Militaires d’Invalidité et des Victimes de la Guerre abordent cette problématique de droit à pension militaire d’invalidité et d’imputabilité liée au service lorsque le militaire rencontre des problèmes de santé.

Ledit Code précise que :

« Est reconnu imputable au service, lorsque le militaire ou ses ayants droit en apportent la preuve ou lorsque l’enquête permet à l’autorité administrative de disposer des éléments suffisants, l’accident de trajet dont est victime le militaire qui se produit sur le parcours habituel entre le lieu où s’accomplit son service et sa résidence ou son lieu de restauration et pendant la durée normale pour l’effectuer, sauf si un fait personnel du militaire ou toute autre circonstance particulière étrangère notamment aux nécessités de la vie courante est de nature à détacher l’accident du service ».

Cet article est important.

 Il rappelle que si l’imputabilité de l’accident s’explique parfaitement sur le terrain, cette notion prend également en compte les accidents de trajet.

L’article L 121-2-3 du même Code rappelle quant à lui que la recherche d’imputabilité est effectuée au vu du dossier médical constitué pour chaque militaire lors de son examen de sélection et d’incorporation.

Dans tous les cas, la filiation médicale doit être établie entre la blessure ou la maladie ayant fait l’objet de la constatation et l’infirmité invoquée.

Si cet article L 121-3 précise que la présomption bénéficie aux prisonniers de guerre et internés à l’étranger dans des conditions prévues par décret en Conseil d’Etat, il n’en demeure pas moins que le militaire qui rencontre des problématiques de santé liées à une blessure ou à une maladie et qui sollicite une pension militaire d’invalidité devra se soumettre à cette recherche d’imputabilité au service.

La demande de pension militaire d’invalidité peut alors devenir en soi une véritable épreuve du combattant….

La question est même parfois pose par certains clients quant à la « partialité » du médecin militaire qui va procéder aux dites analyses.

Il est important de rappeler au militaire qu’il peut parfaitement envisager une expertise contradictoire au besoin dans le cadre d’une procédure précontentieuse devant la commission de recours amiable de l’armée ou alors, dans le cadre d’une procédure contentieuse devant le Tribunal Administratif.

Ceci d’autant plus qu’il est évident que le déroulement de l’expertise sera déterminante pour caractériser l’imputabilité des blessures ou de la maladie au service.

Cette expertise est donc importante.


Elle est assujettie à une véritable procédure afin que l’expert s’assure bien du respect de la nomenclature en la matière et détermine s’il y a, ou non, imputabilité ouvrant ainsi droit à pension militaire d’invalidité.

Dès lors, le médecin expert doit effectuer un certain nombre de diligences, et ce, à plusieurs stades.

En effet, il y a plusieurs instances et plusieurs hypothèses d’expertise dans le cadre des interventions telles que prévues le Code des Pensions Militaires d’Invalidité et des Victimes de la Guerre

Il convient de dissocier la première instance de l’instance en renouvellement triennal.

Des révisions sont possibles en aggravation des infirmités, que celles-ci soient temporaires ou définitives.

Une révision peut parfaitement être effectuée dans l’hypothèse d’apparition d’une infirmité nouvelle.

Des études spécifiques peuvent également être imposées afin de voir si l’invalidité nécessite l’assistance d’une tierce personne, ou génère une incapacité de travailler due à une infirmité pensionnée.

L’expert doit alors procéder à un libellé d’infirmité pour déterminer la situation en termes d’infirmité.

Il doit également effectuer une description précise et concise du retentissement fonctionnel en déterminant un taux d’invalidité conforme au guide barème des pensions militaires d’invalidité (GBPMI).

Le militaire n’est pas passif et doit apporter la preuve de la réalité de l’infirmité.

Cela sera naturellement déterminant pour l’octroi de la pension militaire d’invalidité.

Il lui appartient de fournir :

  • les certificats médicaux,
  • les comptes rendus d’examens complémentaires, comptes rendus d’hospitalisation et de consultation,
  • des extraits du livret médical militaire (LM) et du livret médical réduit (LMR) (OPEX).

D’autres pièces médicales militaires peuvent y figurer et contribuent à l’étude de l’antériorité :

  • fiche médicale de sélection-incorporation,
  • fiches de visites médicales périodiques,
  • fiche de visite de fin de service,

Il est important de préciser que le militaire a accès à son dossier médical militaire et qu’il est en droit de le consulter et de le fournir à son conseil.

Le militaire peut apporter à l’expert le jour de l’expertise des éléments du suivi médical récent et les résultats des examens complémentaires (radiographies, scanner, IRM …).

Chaque élément apporté par le militaire doit faire l’objet d’une réflexion de l’expert qui doit discuter et confirmer ou infirmer de manière détaillée le diagnostic.

L’expert doit déterminer la nature de l’infirmité en précisant si celle-ci est de nature « blessure » ou de nature « maladie ».

Il doit déterminer les faits générateurs avec un rapport circonstancié.

Pour établir la preuve, l’expert doit démontrer un lien médical entre le fait générateur et les séquelles allégués.

La relation médicale doit être certaine directe et déterminante entre l’infirmité et le fait initial.

Il s’agit une présomption circonstancielle de temps et de lieu de constat de l’infirmité, sans rapport avec les présomptions des tableaux des maladies professionnelles des statuts civils.

Il n’y a pas de présomption de maladie professionnelle militaire au sens de la législation des maladies professionnelles en droit du travail.

Par contre toute maladie peut être admise par présomption, sauf administration de la preuve contraire, si elle a été médicalement constatée dans les délais légaux.

L’analyse de la présomption appartient au médecin conseil de la sous-direction des pensions et s’il souhaite l’écarter, il doit rapporter la preuve de l’absence d’imputabilité.

L’évaluation du taux d’invalidité est extrêmement importante car l’article 26 rappelle que l’expert doit décrire les séquelles issues des limitations fonctionnelles et le retentissement sur l’état général et proposer un taux d’invalidité conforme au guide barème, compte tenu des séquelles objectives décrites.

Le minimum indemnisable pour blessure est de 10%.

Le minimum indemnisable pour maladie hors guerre est de 30 % et 10% pour une maladie d’origine guerre ou opération extérieure / OPEX.

L’article 8 du CPMI aborde la problématique de la périodicité et consolidation administrative.

L’infirmité de nature blessure atteignant le minimum indemnisable et dont l’imputabilité a été admise ouvre droit à pension pour une période triennale.

L’infirmité de nature maladie atteignant le minimum indemnisable et dont l’imputabilité a été admise ouvre droit à pension pour 3 périodes triennales.

A l’issue de chaque période triennale, une expertise est réalisée pour nouvelle évaluation du taux d’invalidité.

Le taux d’invalidité peut être stationnaire, revu à la hausse ou à la baisse, voire être évalué inférieur au minimum indemnisable.

Il importe de rappeler que l’expert doit décrire et évaluer la part étrangère au service et clairement la quantifier.

L’expertise médicale se fait en plusieurs étapes.

Tout d’abord l’expert prend connaissance des antécédents du miliaire, doit prendre en considération ses doléances et procéder à un examen clinique voire un examen complémentaire si besoin était.

Enfin, l’expert doit amorcer une véritable discussion sur le terrain médical mais également juridique pour procéder à l’établissement d’un diagnostic précis rassemblant les éléments relatifs à l’infirmité étudiée puis s’intéresser à l’imputabilité du service pour s’assurer pour le militaire aura bien droit à une pension militaire d’invalidité.

Il est important de préciser que malheureusement, cette dynamique amène souvent à des axes de rejet tant sur le taux d’invalidité que sur la problématique de l’imputabilité du service.

Afin d’éviter toute « lacune » de l’expert quant aux vérifications d’usage préconisées et aux présomptions d’imputabilité telles que prévues par le Code des Pensions Militaires d’Invalidité et des Victimes de la Guerre, il est très important que le militaire ouvre clairement le débat avec l’expert quant à l’imputabilité des blessures ou de la maladie avec le service, afin d’obtenir une pension militaire d’invalidité.

En sus, avec un bon taux,

Il peut être assisté de son propre médecin conseil mais également et surtout de son avocat, tant dans la phase d’expertise, que dans le cadre d’une procédure précontentieuse devant la commission de recours amiable de l’armée ou, enfin, dans le cadre d’une procédure contentieuse devant le Tribunal Administratif.

Article rédigé par Maître Laurent LATAPIE,

Avocat, Docteur en Droit,

www.laurent-latapie-avocat.fr

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