Il convient à de s’intéresser aux conséquences de l’épidémie du coronavirus, du confinement, ainsi que de la portée du discours du Président sur le report des échéances bancaires, des échéances de loyers commerciaux, de loyers professionnels, de locations de machines-outils ou encore de locations de véhicules ? Quelle attitude doit adopter le chef d’entreprise ? Que faire que diable ?
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Il convient à de s’intéresser aux conséquences de l’épidémie du coronavirus ainsi que de la portée du discours du Président sur le report des échéances bancaires, des échéances de loyers commerciaux, de loyers professionnels, de locations de machines-outils ou encore de locations de véhicules.
Il est bien évident que l’épidémie du virus coronavirus, autrement appelé COVID 19 entraine une situation de crise inédite pour les entreprises en France et plus particulièrement dans notre région composée essentiellement de petites et très petites entreprises.
Notre Président MACRON, dans son discours du 16 mars 2020, précisait « Pour la vie économique, pour ce qui concerne la France, aucune entreprise, quelle que soit sa taille, ne sera livrée au risque de faillite.
Aucune Française, aucun Français, ne sera laissé sans ressources.
S’agissant des entreprises, nous mettons en place un dispositif exceptionnel de report de charges fiscales et sociales, de soutien au report d’échéances bancaires et de garanties de l’Etat à hauteur de 300 milliards d’euros pour tous les prêts bancaires contractés auprès des banques.
Pour les plus petites d’entre elles et tant que la situation durera, celles qui font face à des difficultés n’auront rien à débourser, ni pour les impôts, ni pour les cotisations sociales.
Les factures d’eau, de gaz ou d’électricité ainsi que les loyers devront être suspendus.
En outre, afin que personne ne soit laissé sans ressources, pour les salariés, le dispositif de chômage partiel sera massivement élargi, comme je vous l’avais annoncé jeudi dernier et comme le Gouvernement a commencé à le préciser.
Pour les entrepreneurs, commerçants, artisans, un fonds de solidarité sera créé, abondé par l’Etat, et auquel le Premier ministre proposera aux régions aussi de contribuer.
Le Gouvernement, dès demain, précisera toutes ces mesures.
Elles seront en fonction des besoins, des réalités économiques, des nécessités secteur par secteur, évidemment adaptées.
Nous serons au rendez-vous pour que notre économie soit préservée dans cette période si dure et pour que l’ensemble des travailleuses et des travailleurs puissent avoir cette sécurité aussi en termes de pouvoir d’achat, de continuité de leur vie ».
Il est bien évident qu’entre les grands discours et leur application il y a toujours un fossé qu’il convient d’anticiper et de prévenir autant que faire se peut.
S’il est vrai que l’Etat engage pleinement sa responsabilité dans le cadre de la mise en place de cette situation d’urgence sanitaire, il n’en demeure pas moins qu’il appartient à tout un chacun de s’organiser pour prévenir toutes difficultés qui pourraient survenir par la suite.
Comme chacun sait, on n’est jamais si bien servi que par soi-même surtout lorsqu’on est chef d’entreprise, artisan, entrepreneur, la vie économique nous le rappelle au quotidien tant avec les partenaires privés que publics (services fiscaux et charges sociales).
Le seul responsable de l’entreprise quelle que soit les circonstances demeure toujours le chef d’entreprise.
Des interrogations commencent à se poser notamment au sein des entreprises du BTP, sensibles au discours d’un Ministre qui envisage de poursuivre l’activité nonobstant le confinement tout en sachant bien que si un ouvrier se retrouvait malade et décédait, le chef d’entreprise s’en trouverait forcément responsable au titre de son obligation de sécurité de résultat.
Dès lors poursuivre son activité est-il vraiment possible ?
En réalité, tout laisse à penser que le confinement va amener une absence totale de chiffres d’affaires.
Qu’en sera-t-il du sort de l’entreprise ?
Concernant les charges fiscales et sociales, il n’échappera pas au lecteur attentif qu’il n’est nullement question d’annulation de paiement mais seulement de report et de suspension.
In fine, il y aura forcément un retour de manivelle lorsque l’activité économique reprendra et chacun devra faire face à ses obligations fiscales et sociales.
Si le chiffre d’affaires 2020 risque d’être mauvais voire catastrophique, rappelons que les charges fiscales et sociales sont calculées sur les années précédentes et les entreprises vont rencontrer les plus grandes difficultés à faire face à ce décalage N-1 ou N-2.
Concernant les salariés, la mise en place du chômage partiel ou technique est assujettie à des problématiques de critères même si la France bénéficie d’un système élargi.
Il ne faut pas oublier que les Etats Unis ont un système de chômage technique partiel où moins de 20% des salariés peuvent en bénéficier.
Dès lors, tout laisse à penser que la crise du coronavirus outre Atlantique sera extrêmement impactant au niveau salarial et économique, qu’importe le discours édulcoré du POTUS de notre cher ami Donald.
Le confinement de l’ensemble des entreprises françaises n’a pas été attendue par l’administration publique qui a déjà pris soin de mettre en place son confinement.
Par voie de conséquence, même avec la meilleure volonté, les délais demandes de prises en charge de chômage technique ou partiel seront allongés.
Ce sera donc à l’entreprise de faire l’avance des salaires, et donc d’assumer une fois de plus l’effort financier du paiement des salaires le temps que l’Etat fasse le nécessaire pour le remboursement.
Il convient surtout de s’intéresser à ce stade à la problématique du sort des échéances bancaires et des échéances de loyers et charges, eau, gaz, électricité, loyers commerciaux, loyers relatifs à la location de machines-outils, ou encore de véhicules.
Au niveau bancaire, les mesures de suspension et de report proposés par notre Président génère immanquablement plusieurs problématiques, réflexions et incidences.
La première problématique est liée aux échéances bancaires et notamment aux échéances des prêts en cours (immobiliers, équipements, prêt personnel aux fins de trésorerie).
Il y a matière à espérer une suspension des échéances le temps du confinement mais également pendant la période de reprise d’activité jusqu’à un niveau normal.
Mais il vaut mieux prévenir que guérir et je pense que, nonobstant les espoirs que l’on peut porter sur les dispositions prises, qui sont pour l’heure que des déclarations d’intention, il est important que chacun prévienne sa banque de ce qu’il entend bénéficier de cette suspension pour qu’on ne puisse pas par la suite venir lui reprocher une quelconque inertie.
Il convient de prendre les devants intelligemment en adressant des correspondances visant à sensibiliser la banque sur une situation qu’elle n’ignore pas certes mais qu’il est toujours bon de rappeler.
Cette correspondance sera lue par l’établissement bancaire mais également par le magistrat si par extraordinaire la situation devait s’envenimer.
Cela est d’importance.
L’objectif est d’échapper à une déchéance du terme et de pouvoir poursuivre le paiement des échéances.
Il convient de rappeler que si le Code de la Consommation permet une suspension judiciaire des échéances pour les particuliers, il n’en demeure pas moins que rien ne permet cette mise en place pour les entreprises dans le Code de Commerce.
En revanche, les dispositions générales du Code Civil permet une demande de délais jusqu’à deux ans qu’il convient donc de formuler dans cette lettre afin d’anticiper les difficultés et de démontrer sa bonne foi.
Cela signifie qu’il est toujours possible de solliciter une suspension judiciaire des échéances, une absence de fichage FICP, un gel des intérêts contractuels, un gel des intérêts intercalaires et l’absence totale de frais, pénalités et majorations divers et variés le temps de la période de suspension.
La banque est souvent friande de clauses conventionnelles dans les conditions générales ou particulières faisant exploser de manière assassine les intérêts, frais et pénalités d’une créance bancaire lorsque celle-ci n’est pas payée à échéance.
Il conviendra également que cette correspondance attire l’attention de l’établissement bancaire sur l’impossibilité pour lui de prononcer la déchéance du terme d’un prêt sur la seule base d’impayés découlant de la période de confinement.
Cela est à mon sens fondamental.
Il m’apparait important de privilégier cette approche amiable pour empêcher la banque de tirer profit de cette situation.
La question qui se pose également est de savoir si la banque pourrait augmenter les facilités de caisse et de trésorerie ainsi que le découvert autorisé.
Cette question m’a déjà été posée.
Il m’apparait plus difficile d’obtenir de la banque une solidarité accrue l’amenant à participer activement à un effort financier supplémentaire.
En effet, l’absence de chiffre d’affaires peut être un frein déjà trop utilisé par la banque.
La solution alternative serait que le chef d’entreprise se porte caution mais cela viendrait alourdir sa prise de risques personnelle.
Concernant les factures d’eau, gaz, électricité, loyer et charges, la déclaration du Président de la République laisse à penser qu’elles seront suspendues d’office.
Une prochaine publication sera faite sur la portée du décret qui va en découler.
Tout laisse à penser que ces mesures ont vocation à s’appliquer tant pour les logements à usage d’habitation que pour les locaux commerciaux puisqu’il n’est fait aucune distinction quelle qu’elle soit.
Rien n’empêche le chef d’entreprise de pouvoir bénéficier et donc de solliciter une suspension des factures et je pense que malgré tout, une correspondance amiable serait de bon aloi.
Concernant les loyers, (loyers commerciaux, loyers professionnels, loyers pour machines-outils, loyers pour véhicules…) il est impératif que le bailleur ne soit pas en mesure de se servir du non-paiement des loyers pour envisager de faire délivrer un commandement de payer visant la clause résolutoire et mettre fin au bail commercial.
Si tout laisse à penser que les baux d’habitations seront particulièrement privilégiés à la lueur des impératifs de la loi de 1989, pour les baux commerciaux, la rigueur contractuelle peut l’emporter parfois sur les intérêts d’Ordre public.
A mon sens, il est tout aussi judicieux d’adresser une correspondance à son bailleur pour attirer son attention sur les conséquences du confinement sur le chiffre d’affaires, et par là même le paiement des échéances.
Là encore, l’idée d’une suspension insufflée par notre Président ne s’entend pas comme une annulation.
Même du côté du bailleur, une correspondance de son locataire en situation de confinement et de délicatesse financière me parait importante car tout laisse à penser qu’il doit lui-même faire face à ses propres obligations financières et bancaires.
Surtout, il appartient au locataire commercial ou professionnel de ne pas s’exposer à un risque d’acquisition de la clause de résiliation du contrat de bail commercial, de bail professionnel, ou même pour les contrats de location de véhicules, plus particulièrement dans ce domaine spécifique ou les indemnités de résiliation coutent bien souvent plus cher que le véhicule loué.
A mon sens, il conviendra de trouver des échéanciers pertinents pour permettre à chacun de faire face à ses obligations.
La première idée est d’anticiper la difficulté.
La deuxième idée est ensuite d’imaginer de solliciter, tantôt amiablement, tantôt judiciairement, une suspension, un report, et à défaut des délais avec le moins de conséquences dommageables pour le chef d’entreprise, au cas ou par extraordinaire, ses premiers partenaires économiques privés, banque et bailleur, n’appréhendent pas à leur juste mesure « l’effort de guerre » pourtant clairement insufflé par notre Président ce 16 mars 2020,
La période de confinement commence à peine et on a encore du mal à déterminer l’étendue des conséquences économiques.
Il faudra donc anticiper ces difficultés autant que faire se peut.
D’autres chroniques suivront bien sûr pour aider les chefs d’entreprises pendant cette période d’urgence sanitaire d’abord, et d’urgence économique ensuite.
Article rédigé par Maître Laurent LATAPIE,
Avocat, Docteur en Droit,
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