Sauvegarde ou redressement judiciaire pour stopper une saisie immobilière ? 

laurent latapie avocat reportage 2025

Une société civile immobilière poursuivi par sa banque en saisie immobilière décide de se placer en sauvegarde de justice pour sauver son bien immobilier. Est-ce efficace ? un redressement judiciaire ne serait-il pas plus judicieux ? est-il possible de cumuler sauvegarde et redressement judiciaire ?

 

Article :

 

Il convient de s’intéresser à un arrêt qui a été rendu par la Cour de cassation en septembre dernier, 2ème chambre civile, 14 septembre 2023, N°21-19.459 et qui vient aborder la problématique de la date à prendre en considération pour établir la date de cessation des paiements alors qu’un commandement de payer valant saisie immobilière a été signifié.

 

Quels sont les faits ?

 

Dans cette affaire, la banque avait consenti, par deux actes notariés des 21 janvier 2014 et 03 octobre 2016 deux prêts à une société I.

 

Après lui avoir adressé plusieurs mises en demeure, la banque a notifié à la société I par lettre du 10 avril 2019 la déchéance du terme des prêts, puis, lui a délivré par acte du 20 septembre 2019 deux commandements de payer valant saisie immobilière.

 

Par jugement du 17 décembre 2019, le Tribunal judiciaire a, sur requête déposée par ladite société I, ouvert une procédure de sauvegarde à son profit désignant Maître H administrateur judiciaire et Maître G mandataire judiciaire.

 

Pour autant, la banque a formé tierce opposition à ce jugement faisant valoir que la société était en état de cessation des paiements.

 

Une tierce opposition pour contester la procédure de sauvegarde


Par jugement en date du 22 septembre 2020, le Tribunal a déclaré la déchéance du terme non acquise et confirmé le jugement du 17 décembre 2019.

 

C’est ainsi que le pourvoi se présentait devant la haute juridiction.

 

À hauteur de Cour de cassation, la société I faisait grief à la Cour d’appel d’avoir reçu la banque en sa tierce opposition, d’avoir rejeté ses demandes de sursis à statuer et de dire que la société I était en état de cessation des paiements lorsqu’elle a sollicité son placement sous sauvegarde de justice.

 

De telle sorte qu’il y avait lieu d’ordonner la rétractation du jugement d’ouverture de sauvegarde judiciaire rendu par le Tribunal judiciaire, d’ouvrir une procédure de redressement judiciaire et de fixer la date de cessation des paiements au 29 septembre 2019.

 

Étant rappelé que cette date correspondait au jour de la signification des commandements de payer valant saisie immobilière.

 

Une cessation des paiements consacrée au jour du commandement de payer

 

Selon la société I, la cessation des paiements est caractérisée par l’impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible.

 

Un créancier doit, pour procéder à une saisie immobilière, être muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible.

 

De telle sorte que, selon la société I, le fait pour le débiteur de ne pas contester un commandement de payer valant saisie avant d’être assigné par son créancier devant le Juge de l’exécution ne vaut pas reconnaissance de sa part de l’exigibilité de sa créance et ne le prive pas du droit de la contester par la suite.

 

Ainsi, pour la société I, la Cour d’appel ne pouvait déclarer qu’elle était déjà en cessation des paiements lorsqu’elle a sollicité son placement sous sauvegarde de justice et d’ordonner par la même la rétractation du jugement d’ouverture de sauvegarde judiciaire pour la placer finalement en redressement judiciaire.

 

Sauvegarde ou redressement judiciaire, que choisir ?

 

La société I considérait que le seul fait d’être destinataire d’une signification d’un commandement de payer valant saisie immobilière ne sous-tendait pas la reconnaissance de l’exigibilité de la créance qui était par ailleurs contestée par ladite société dans le cadre de la procédure de saisie immobilière.

 

De telle sorte que le commandement de payer valant saisie immobilière ne pouvait valoir reconnaissance de l’exigibilité de la créance et pas plus ne permettait de caractériser l’état de cessation des paiements de l’entreprise.

 

Selon la société I, la cessation des paiements est caractérisée par l’impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible.


De telle sorte qu’un créancier doit, pour procéder à une saisie immobilière, être muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide exigible.

 

De telle sorte que le défaut de paiement par le débiteur dans les huit jours de la signification d’un commandement de payer valant saisie a pour seul effet de permettre la poursuite de la procédure à la fin de la vente de l’immeuble et l’assignation du débiteur à comparaitre devant le Juge de l’orientation mais que, pour autant, cela ne permettait pas de considérer que la société I était en état de cessation des paiements lorsqu’elle a sollicité son placement sous sauvegarde de justice et qu’il n’y avait donc pas lieu d’ordonner la rétractation dudit jugement d’ouverture de sauvegarde judiciaire pour la replacer en redressement judiciaire.

 

La Cour de cassation ne partage pas son analyse et ce, au visa de l’article L 620-1 et suivants du Code du commerce.

 

La Cour de cassation rappelle qu’il est ainsi une procédure de sauvegarde ouverte sur demande d’un débiteur mentionnée à l’article L 622-2 du Code du commerce qui, sans être en cessation des paiements, justifie des difficultés qu’il n’est pas en mesure de surmonter aux termes du deuxième, les contrats légalement formés tiennent lieu de Loi à ceux qui les ont faits.

 

Il résulte du dernier de ces textes que seul le créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut en poursuivre l’exécution forcée sur les biens de son débiteur.

 

Une créance certaine, liquide et exigible pur enclencher une saisie immobilière

 

Pour la Haute juridiction, pour rétracter le jugement du 17 décembre 2019 et ouvrir une procédure de redressement judiciaire à l’encontre de la société, la Cour d’appel a retenu que les commandements de payer valant saisie immobilière n’ont été contestés par la société ni dans leurs principes, ni dans leurs montants et qui n’est pas non plus justifié de la régularisation de ces commandements dans le délai imparti de huit jours, rendant ainsi ces sommes exigibles.

 

Pour la Haute juridiction, il y a lieu d’en déduire, sans qu’il n’y ait lieu d’examiner la validité des mises en demeure du 08 janvier 2019 et du 22 février 2019 ainsi que l’exigibilité de la créance à ces dates, comme l’invite à le faire les parties en cause, la société I était, à l’expiration de ce délai, en état de cessation des paiements puisque se trouvant dans l’impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible et ce, dès le 29 septembre 2019, soit, bien antérieurement à la saisine du Tribunal.

 

Une créance exigible justifiant un redressement judiciaire ?

 

Dès lors, la Cour de cassation souligne que, en se déterminant ainsi alors que la délivrance sur le fondement d’un acte de prêt notarié d’un commandement de payer valant saisie immobilière n’a pas pour effet de déroger aux stipulations du contrat relatives à l’exigibilité de la créance dont le recouvrement est poursuivi.

 

Pour la Haute juridiction, la Cour d’appel, qui n’a pas vérifié si au jour du jugement d’ouverture de la procédure de sauvegarde les sommes réclamées par la banque au titre de chacun des prêts étaient devenues exigibles conformément aux stipulations contractuelles, n’a pas donné de base légale à sa décision.

 

La Cour de cassation cassant et annulant ainsi l’arrêt en litige et renvoyant les parties devant une autre Cour d’appel.

 

Cette jurisprudence est intéressante à plus d’un titre.

 

Premièrement, celle-ci a clairement un impact.

 

Lorsqu’un créancier entend voir prononcer l’ouverture d’un redressement ou d’une liquidation judiciaire, cela suppose que soit caractérisé l’état de cessation des paiements de ce débiteur.

 

La condition tenant ainsi à l’exigibilité n’est pas considérée comme rempli par le seul fait du commandement de payer valant saisie immobilière.

 

Cette diligence procédurale n’affecte pas en elle-même l’exigibilité de la créance telle qu’elle résulte du contrat ayant donné naissance à la créance invoquée.

 

Le créancier est en conséquence tenu de se référer aux stipulations contractuelles sur ce point s’il entend voir reconnaitre l’état de cessation des paiements.

 

Pour autant, si cette jurisprudence a un impact pour le créancier tel que cela vient d’être présenté, il n’en demeure pas moins que cela a surtout un impact pour le débiteur, à plus d’un titre d’ailleurs.

 

Comment arrêter une procédure de saisie immobilière ?

 

Premièrement, il est vrai que lorsque le débiteur est une société et non pas une personne physique et qu’il se retrouve du coup exclu des dispositions du Code de la consommation, l’une des solutions « barrage » dans le cadre d’une procédure de saisie immobilière alors que celui-ci est acculé vers une adjudication aux conséquences pouvant être parfois dramatiques et voyant tous ses moyens de fait et de droit rejetés puisque ce dernier n’a pas vocation à bénéficier des dispositions avantageuses du Code de la consommation, il est vrai que le Droit de l’entreprise en difficulté devient une porte de sortie honorable et une solution de repli efficace.

 

En effet, l’arrêt des poursuites individuelles attachées au principe même de l’ouverture d’une procédure collective, qu’il s’agisse d’une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire, ont pas mal d’avantages puisqu’elles permettent, premièrement, de bénéficier de l’arrêt des poursuites individuelles, deuxièmement, il convient de rappeler que cet arrêt des poursuites individuelles peut être enclenché jusqu’au jour de l’audience d’adjudication, ce qui fait que cela offre quand même sur le terrain calendaire une certaine marge de manœuvre et une certaine maniabilité intelligente.

 

Cela permet également d’envisager de présenter en suite un plan.

 

La présentation d’un plan de redressement pour sauver le bien immobilier saisi

 

La distinction entre la procédure de sauvegarde et de redressement judiciaire est d’importance puisque, selon les textes, la sauvegarde est ouverte au débiteur qui n’est pas en cessation des paiements depuis moins de quarante-cinq jours.

 

Alors qu’en redressement judiciaire, la cessation des paiements est actée qu’importe que les quarante-cinq jours soient acquis, pas encore acquis ou acquis depuis bien longtemps.

 

Or, il est bien évident que lorsque le débiteur se place en procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire alors que la déchéance du terme a été prononcée, alors que ce dernier a été destinataire de mises en demeure, lui et les cautions par ailleurs, personnes physiques membres de la société civile immobilière, et alors qu’une assignation à comparaitre a été rendue devant le Juge de l’orientation et que parfois même un jugement d’orientation a été rendu, puis, un arrêt de la Cour d’appel confirmatif a été rendu et que nous sommes à rien de l’audience d’adjudication et que le débiteur se précipite devant la Chambre des procédures collectives pour obtenir une ouverture d’une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire, la question de savoir s’il est pertinent de se placer en sauvegarde ou en redressement judiciaire peut avoir tout son sens.

 

Preuve en est d’ailleurs, la société I s’était placée en sauvegarde et le créancier saisissant, établissement bancaire, avait cru bon immédiatement faire une tierce opposition afin de contester l’idée-même d’une procédure de sauvegarde.

 

Quelle différence entre sauvegarde et redressement judiciaire ?

 

Dès lors, il est vrai que, dans la mesure où les quarante-cinq jours de cessation des paiements peuvent effectivement être écoulés depuis la mise en demeure prononçant la déchéance du terme depuis la signification du commandement de payer, il peut effectivement sembler délicat de se placer en sauvegarde de justice et que le redressement judiciaire semble être plus approprié à la cessation des paiements actée depuis un certain temps.

 

Pour autant, la procédure de sauvegarde offre des avantages importants.

 

Le premier des avantages est qu’elle permet de présenter un plan de sauvegarde et, en cas de difficulté dans l’exécution de ce plan de sauvegarde, de se placer par la suite en redressement judiciaire, puis, de présenter un nouveau plan de redressement.

 

Un cumul entre sauvegarde et redressement judiciaire : 2 fois 10 ans ?

 

Ce qui permettrait, pour le débiteur avec une créance importante, de ne pas se retrouver bloqué dans un calendrier de paiement sur dix ans mais pourrait à ce moment-là imaginer « tirer sur la corde » pour présenter d’abord une sauvegarde judiciaire, puis, un plan de sauvegarde sur dix ans, puis, une année de redressement judiciaire et encore dix ans de redressement judiciaire derrière car, à l’inverse, en cas de redressement judiciaire, la mécanique est différente.

 

Si le plan de redressement est obtenu et qu’il n’est pas respecté par la suite, il n’y a aucune autre alternative que la liquidation judiciaire.

 

Pour autant, cette problématique de date de cessation des paiements peut amener certaines Chambres des procédures collectives à refuser d’ouvrir une procédure de sauvegarde.

 

Or, lorsque le calendrier est extrêmement court entre l’obtention d’une date d’audience devant la Chambre des procédures collectives avec un jugement parfois réclamé sur le siège afin de l’intégrer dans le calendrier très spécifique de la saisie immobilière avec une audience d’adjudication arrivant à grands pas, le choix de la procédure peut être déterminant car si la Chambre des procédures collectives vous refuse une procédure de sauvegarde et considère que vous n’avez pas vocation à être placé en sauvegarde judiciaire, vous pouvez vous retrouver hors procédure collective et donc assujetti à une adjudication catastrophique.

 

C’est ainsi l’enseignement que vient nous apporter cette jurisprudence.

 

Faut-il contester l’exigibilité de la créance en saisie immobilière ?

 

Le deuxième enseignement est d’importance aussi puisqu’il rappelle et il découle notamment d’un élan jurisprudentiel de plus en plus marqué que, tant bien même le créancier bénéficie d’un titre exécutoire qui découle notamment de la clause du titre exécutoire dans l’acte authentique du prêt et d’une correspondance prononçant la déchéance du terme, il n’en demeure pas moins que, tant bien même nous serions devant le Juge de l’exécution immobilier, ou tant bien même nous serions, par la suite, devant la Chambre des procédures collectives, il n’en demeure pas moins que le débat relatif à la déchéance du terme et au caractère exigible de la créance peut être développé et soutenu à n’importe quel moment, amenant ainsi les Juges à s’interroger sur le caractère d’exigibilité de la créance.

 

Ce qui pourrait amener le débiteur à réaborder cette problématique d’exigibilité et notamment, en l’état des jurisprudences récentes de la Cour de justice de l’Union Européenne et de toutes celles relatives à la problématique de la validité de la déchéance du terme, se positionner en remettant en question une déchéance du terme qui pourrait sembler être acquise et, du coup, indiscutable par le créancier saisissant.

 

Dès lors, force est de constater que les moyens de contestation perdurent et qu’ils peuvent finalement être soulevés à plusieurs titres devant plusieurs Juges à plusieurs stades de la procédure, tantôt de saisie immobilière, tantôt de procédure collective en sauvegarde ou en redressement judiciaire.

 

Article rédigé par Maître Laurent LATAPIE,

Avocat à Fréjus-Saint-Raphaël,

Docteur en Droit, Chargé d’enseignement,

www.laurent-latapie-avocat.fr

 

 

 

 

Quelle juridiction et Loi applicable au divorce international ?

Laurent LATAPIE vacances judiciaires
Laurent LATAPIE vacances judiciaires
laurent latapie vacances judiciaires

Ce qu’il faut savoir sur la juridiction et la loi applicable en termes de divorce international

 

Article :

Le divorce international est un sujet complexe, impliquant divers systèmes juridiques et législations selon les pays impliqués. 

Cet article aborde les questions cruciales relatives aux tribunaux compétents, au déroulement des divorces hors de l’Union Européenne, à la loi applicable, ainsi qu’aux effets des divorces prononcés en France et à l’étranger.

Divorce international : procédures et lois applicables

Application de la loi : tribunaux compétents pour les divorces internationaux

Lorsqu’un des deux mariés souhaite divorcer dans des contextes internationaux, il est essentiel de déterminer quel tribunal est compétent pour traiter la demande. La décision de la cour compétente peut dépendre de plusieurs facteurs, notamment la résidence habituelle des époux, leur nationalité et les conventions internationales en vigueur.

Union Européenne UE

Dans l’UE, le Règlement Bruxelles II bis (n°2201/2003) régit la compétence de type judiciaire en matière de divorces. Ce règlement permet de saisir le tribunal de l’État membre où se trouve le lieu de vie habituel des ex conjoints, ou celle de l’un des époux en cas de séparation. Si les époux disposent d’un lieu de vie commun, cette cour est généralement compétente.

Hors Union Européenne UE

Pour les époux résidant hors du système européen, la détermination de la compétence peut s’avérer plus complexe et dépendra des conventions de type internationales (comme la Convention de La Haye) et des lois nationales de chaque pays.

En France, le Code de procédure civile prévoit que le juge français est compétent si l’un des époux est de nationalité française ou si l’un des époux réside habituellement sur le sol français.

Déroulement du divorce hors de l’Union Européenne UE

Le déroulement des divorces hors du système européen varie en fonction de l’application des législations nationales et des conventions internationales applicables.

Généralement, les étapes suivantes sont observées :

  • Introduction de la demande : L’époux demandeur doit déposer une requête devant le tribunal compétent, en respectant les règles de procédure du pays concerné.
  • Examen de la demande : Le tribunal examine la demande en tenant compte des éléments présentés par les deux parties, y compris les preuves de la rupture du mariage.
  • Médiation et conciliation : Certains pays imposent une phase de médiation ou de conciliation avant de prononcer le divorce.
  • Jugement : Si les conditions légales sont remplies, le tribunal prononce le divorce et statue sur les conséquences liées à la garde des enfants, la pension alimentaire et la liquidation du régime matrimonial.

Loi applicable aux divorces internationaux

La détermination de la loi applicable est cruciale dans les divorces internationaux. Elle peut influencer les droits et obligations des époux.

Union Européenne UE

Le règlement (UE) n°1259/2010, dit « Rome III », permet aux époux de choisir la loi applicable à leur divorce, à condition que cette loi ait un lien réel avec leur situation (par exemple, la loi de la résidence habituelle ou des nationalités des époux). À défaut de choix, la loi applicable sera celle de la résidence habituelle commune des époux, ou celle de la dernière résidence habituelle commune si l’un des époux y réside encore, ou la loi de la nationalité commune des époux, ou enfin, celle du tribunal saisi.

Hors Union Européenne UE

En dehors de l’UE, les conventions internationales comme la Convention de La Haye de 1970 sur la loi applicable aux obligations alimentaires peuvent s’appliquer. En l’absence de conventions, les tribunaux appliqueront souvent la loi dun lieu de vie habituel des époux au moment de la demande.

Effets du divorce prononcé en France et prononcé à l’Étranger

Les effets des divorces prononcés en France ou dans un autre État peuvent varier considérablement.

Divorces prononcés en France

Les divorces prononcés sur le sol français entraîne des conséquences juridiques immédiates sur le territoire de l’hexagone. Ces effets incluent la dissolution du mariage, la liquidation de l’un des régimes matrimoniaux, les décisions relatives à la garde des enfants, la pension alimentaire et éventuellement la prestation compensatoire.

Divorces prononcés à l’étranger

La reconnaissance sur le sol français d’un divorce prononcé dans un autre État dépend de plusieurs conditions, dont la conformité aux principes de l’ordre public international français et l’absence de fraude à la loi. Si ces conditions sont remplies, le divorce peut être reconnu et produire des effets juridiques en France, notamment en matière de régimes matrimoniaux et de responsabilité parentale.

La mission de l’avocat dans un divorce international

Le divorce international est un processus complexe qui requiert une expertise spécifique en droit international privé. Dans ce contexte, un cabinet d’avocats joue un rôle crucial en assistant et représentant les époux tout au long du processus de divorce. Cette mission implique plusieurs tâches essentielles, allant de la détermination de la compétence juridictionnelle à la gestion des aspects financiers et parentaux du divorce.

Détermination de la compétence juridictionnelle

La première mission du cabinet d’avocats est de déterminer quel tribunal est compétent pour traiter le divorce. 

En fonction de la résidence habituelle des époux, de leur nationalité et des conventions internationales en vigueur, l’avocat doit identifier l’État dont les tribunaux peuvent être saisis. Par exemple, dans l’UE, le Règlement Bruxelles II bis guide cette compétence en tenant compte de la résidence habituelle commune ou individuelle des époux. En dehors de l’UE, les avocats se réfèrent aux conventions internationales telles que la Convention de La Haye pour déterminer la juridiction compétente.

Il convient de citer la jurisprudence en la matière, savoir : Cass 1ère civ, 4 juin 2009, n°08-14.309, dans laquelle la haute juridiction précise :

Selon l’article 309 du code civil, lorsque l’un et l’autre époux ne sont pas de nationalité française ou domiciliés en France et que les tribunaux français sont compétents pour connaître du divorce, celui-ci est régi par la loi française lorsqu’aucune loi étrangère ne se reconnaît compétente.

 

Viole ce texte une cour d’appel qui pour appliquer la loi française, retient que l’épouse n’excipe d’aucune disposition de la loi allemande se reconnaissant compétente pour connaître du divorce sans jamais remettre en cause l’application de la loi française tout au long de la procédure, alors qu’elle devait rechercher si la loi allemande se reconnaissait compétente

 

 

Conseil sur la loi applicable

Une fois la juridiction compétente identifiée, le cabinet d’avocats doit conseiller les époux sur la loi applicable à leur situation. Le choix de cette loi est déterminant, car il influence les droits et obligations des parties. Le Règlement Rome III permet aux époux de choisir la loi applicable, pourvu qu’elle ait un lien significatif avec leur situation, comme la loi de leurs nationalités ou celle de leur résidence habituelle. L’avocat aide à identifier et à choisir la loi la plus avantageuse pour les intérêts de son client.

Gestion du régime matrimonial

La liquidation du régime matrimonial est un autre aspect critique du divorce international. L’avocat doit examiner le régime matrimonial en vigueur, qu’il soit communautaire ou séparatiste, et déterminer comment les biens et les dettes seront répartis. Cela inclut la prise en compte des lois nationales et internationales applicables au régime matrimonial. En France, par exemple, la loi française s’applique souvent pour la liquidation des biens situés en France, mais des conventions internationales peuvent aussi jouer un rôle.

Assistance dans les procédures de séparation de corps

Dans certains cas, les époux peuvent opter pour une séparation de corps plutôt qu’un divorce immédiat. Cette procédure permet aux époux de vivre séparés tout en restant mariés. L’avocat doit guider ses clients à travers cette alternative, en expliquant ses implications juridiques et financières, ainsi que ses effets sur la résidence habituelle et la gestion des biens.

Matière de responsabilité parentale

La gestion des responsabilités parentales est une autre mission clé de l’avocat dans un divorce international.

Il doit veiller à ce que les décisions concernant la garde des enfants, la résidence habituelle des enfants et les pensions alimentaires soient prises dans le meilleur intérêt des enfants et conformes aux lois applicables.

Le Règlement Bruxelles II bis et la Convention de La Haye sur la responsabilité parentale fournissent des cadres pour ces décisions, que l’avocat doit maîtriser et appliquer.

Article rédigé par Maître Laurent LATAPIE,

Avocat à Fréjus-Saint-Raphaël,

Docteur en Droit, Chargé d’enseignement,

www.laurent-latapie-avocat.fr